Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
De Notigou et du Monde
26 août 2013

Histoire de femmes au Bangladesh

Le développement des communautés rurales passent par l’amélioration de la condition féminine. Quand les femmes obtiennent leur autonomie la société toute entière est gagnante.

Le Bangladesh n’échappe pas à cette règle et voici l’histoire de 3 femmes qui ont cherché leur autonomie ou ont aidé leurs consœurs à suivre cette voie.

Ces histoires m’ont été remises par VSO Bangladesh / Nakshikanta  / Shyamnagar, que je remercie vivement, elles étaient en bangladais traduit en anglais. J'ai repris la traduction en anglais et fait une nouvelle traduction en français

Tout d’abord donc celle de Shefali Roy qui vit dans un village reculé dans le sud-ouest du Bangladesh et  qui a quitté l’école très jeune pour être mariée. La plupart des mariages Bangladeshi est arrangée par les parents (mi-juin 2013 la police est intervenue dans un village pour faire cesser une cérémonie de mariage : le marié avait 24 ans mais la mariée seulement 12 !). Elle rejoint le domicile de sa belle-famille et aide les autres femmes dans les activités de la maison : depuis des générations, outre les autres tâches domestiques,  les femmes de la famille font des bracelets. Les bijoux, et donc les bracelets, sont très importants pour les Hindous. Ce sont des signes ostentatoires de richesse, donc de réussite, et les femmes sont couvertes de bijoux : pendentifs d’oreille, anneau dans la narine, chaîne allant de l’oreille à la narine, bracelets, chaîne de cheville, les femmes. Par extension beaucoup de Musulmans suivent cette tradition.

Bref Shefali Roy s’est mise à faire des bracelets. Ceux-ci ont certainement reçu un accueil favorable puisqu’après quelques années elle a décidé d’en faire son métier. Ne souhaitant pas mettre toutes ses économies dans l’affaire, elle a cherché à obtenir un prêt : les banques se sont empressées de ne pas le lui accorder, sa famille n’étant pas solvable. Pourtant son projet était viable aussi la Fondation Nowabeki Ganomukhi le lui a accordé : 5 000 takhas ! Soit l’équivalent de 50 € voilà tout ce que souhaitait Shefali Roy !

C’était en 2000. En 2009, elle a reçu le prix « City Micro Entrepreneur 2009 », remis par le ministre des Finances du Bangladesh et accompagné d’une somme de 350 000 takhas (3 500 €) qui vont lui permettre de développer encore sa petite entreprise.

Elle fabrique des bracelets que son mari va livrer dans les boutiques petites ou grandes de la région.

Cette reconnaissance officielle arrive bien après qu’elle s’est fait un nom dans toute la région et pour que ses voisines suivent son exemple. Evidemment : après avoir accompli leurs tâches ménagères, les femmes ont toujours un double emploi.

Son fournisseur de matières premières, importées du Sri Lanka, n’attend plus sa visite mais vient la livrer. Ce déplacement lui est doublement profitable puisqu’il repart avec des bracelets pour des boutiques plus éloignées.

Des bracelets, elle en fait encore 10 à 12 paires par jour pour un prix unitaire de 2 à 20 €. Si la demande presse, par exemple pendant la saison des mariages, elle peut en faire 20 à 22 paires, mais alors elle s’y consacre à plein temps. Et si cela ne suffit pas elle peut compter sur l’aide de sa belle-sœur Koshilla et de d’ouvrières occasionnelles.

Sa famille est maintenant aisée et il ne lui est pas difficile d’emprunter jusqu’à 1 500 € par an pour sa trésorerie.

Sa plus grande fierté ? Que ses enfants aient tous reçu une bonne éducation, que ses filles aient fait de beaux mariages !

Et si l’affaire tournait mal ? Prudente elle a des terres, une ferme de crevettes et sa propre maison maintenant.

La deuxième histoire de femme bangladeshie ne raconte pas un tel succès et pourtant Hasina Begum a surmonté des difficultés bien plus grandes que Shefali.

Hasina est également issu d’une famille pauvre. Comment pourrait-il en être autrement pour que cela soit une success-story ! Elle vient d’une famille pauvre et d’un village reculé. Comme Shefali et beaucoup d’autres, ses parents l’ont mariée à l’âge de 14 ans avec un maçon du village voisin, pauvre lui aussi puisqu’il habite sur des terres du gouvernement. Le maçon voulait une femme certainement plus comme bonne que comme épouse : il la battait pour la moindre peccadille. Pour qu’il y ait moins de violence, Hasina a voulu et a eu des enfants : deux garçons, l’un derrière l’autre. L’histoire ne dit pas si le maçon a cessé de la battre.

Un des garçons a arrêté très rapidement ses études pour aider chez un barbier, l’autre a continué. Les études coûtent très rapidement chers au Bangladesh. Alors Hasina s’est démenée pour gagner l’argent nécessaire : se plaçant comme servante (0,6 à 0,7 € par jour), aidant à la traite des vaches (0,6 € par mois par une vache locale qui ne produit qu’un verre de lait par jour, 1€ pour une vache importée dont la production est plus importante).

Et puis le gros problème ! Son mari tombe malade. Le docteur dit qu’il faut consulter à Dacca, Hasina accompagne son mari à Dacca. C’est un problème cardiaque, il faut opérer. Cela parait facile mais ici les voyages sont difficiles, longs et dans des autocars inconfortables non-climatisés ; les consultations très coûteuses.

Hasina se démène pour trouver l’argent : emprunt, dons (on arrête les voitures sur la route pour que les conducteurs offrent quelque chose), elle fait tout pour réunir l’argent pour les soins.

Et elle réussit à force de volonté et de courage.

Son mari est sauvé mais il ne peut plus travailler comme maçon, plus de travaux difficiles. Peut-être qu’il ne la bat plus également ?

Hasina a montré que bien que n’ayant pas fait d’études elle peut réussir grâce à une volonté sans faille, à une persévérance à toute épreuve. Elle rejoint la coopérative des femmes sans terre et devient leur porte-parole.

Elle s’est lancée dans l’élevage de poissons blancs dans l’étang qu’elle a : ils la nourrissent mais peuvent aussi être vendus.

Elle obtient un prêt de la coopérative : elle achète du bambou et des plaques de contreplaqué pour faire des coffrages. Elle loue l’équipement à ceux qui construisent : elle gagne entre 20 et 30 € par semaine ou quinzaine selon la demande. Elle et sa famille s’éloignent petit à petit de la pauvreté.

Très impliquée dans la vie de sa communauté, elle est devenue secrétaire de la coopérative des femmes sans terre qui regroupe maintenant 30 membres.

Bien que sa situation ne la mette toujours pas elle et sa famille à l’abri du risque, Hasina a pour nouvel objectif d’avoir un toit bien à elle : elle sait qu’elle y arrivera.

La troisième histoire concerne une femme issue d’un milieu plus aisée, Papia Haq : son père est président d’un conseil communal.

« La force intérieure d’un être humain est sa principale source d’énergie ». Rabindranath Tagore (NDLR : philosophe bengalais du début du siècle dernier)  écrivait que la force intérieure est confiance en soi, indépendance, volonté, espérance, créativité, etc. C’est le capital principal de l’être humain. Riche, pauvre, homme, femme, chacun a sa propre force intérieure. Aussi en profitant de toutes les opportunités de la développer, la responsabilisation des femmes devrait commencer parce que celles qui enrichissent leur force intérieure ne peuvent jamais être pauvre.»

Voilà le discours que tient Papia Haq, membre élu de sa communauté locale et membre du Forum des Femmes de Kashimbari.

Papia Haq est d’une fratrie de 12, 8 sœurs et 4 frères, elle est connue pour son calme et sa sérénité. Elle a suivi des études.

Comme son père était président d’une communauté locale, elle l’a toujours vu aidé les gens, donnant même son repas à plus pauvre et affamé que lui. Encore étudiante elle a été mariée à un jeune homme, président lui aussi d’un conseil communal. C’est alors que son implication pour le bien-être social a commencé.

Elle a commencé par assister aux audiences de son mari qui était très populaire. Si populaire que ses adversaires politiques ont déposé 85 plaintes contre lui dans le but de le rendre inéligible.

Maintenant cela fait depuis 13 ans Papia Haq est engagée dans cette voie. Comme élue femme elle travaille beaucoup dans sa circonscription. Au début elle a dû faire face aux barrières familiales et sociales mais maintenant son mari est à ses côtés. Elle reconnait que le fait d’être une femme lui rend la tâche plus ardue, la voie est plus facile pour un homme que pour une femme.

Quand elle rencontre une femme en détresse elle se sent responsable d’elle, elle veut l’aider autant qu’elle le peut. Alors elle s’implique dans beaucoup d’ateliers de développement en tant que membre d’institutions éducatives qu’elle a créées : écoles, mosquées ou madrasas.

Elle s’intéresse également à l’amélioration des conditions de vie : en implantant un traitement d’eau sur un bassin à côté de Kashimbari Dighi elle a donné un  accès à l’eau potable à des centaines de personnes. Ailleurs elle a fait creuser des puits

Elle a obtenu que les veuves, les handicapés ou les femmes enceintes dans le besoin reçoivent des allocations.

Les financements de toutes ces activités sont parfois difficiles à obtenir, les biens de son père lui permettent de surmonter ces obstacles.

Et Papia Haq de continuer : « Je veux continuer cette sécurité sociale dans le futur, en particulier pour les femmes oppressées ».

Elle a raccommodé beaucoup de couples qui rencontraient des problèmes conjugaux. Combien de fois lors d’arbitrage elle a vu des femmes qui ne savaient pas s’exprimer, timides et perdant ainsi leur affaire. Alors elle se tient à leur côté, parlant pour elle et gagne leur affaire.

En 2011 Ppia Haq a de nouveau été élu au conseil communal : les gens ont voté pour celle qui travaille pour eux et cherche à les aider. Depuis elle est régulièrement réélue.

Publicité
Publicité
Commentaires
De Notigou et du Monde
Publicité
Archives
Publicité